Le blog à m'dame Lassalle

Je n'ai pas de nouvelles récentes de mes vampires, mais je sais que leur vie ressemble à celle de leurs parents, de leurs cousins, de leur famille. Ils ont arrêté l'école très vite, se sont mariés à peine majeurs. Ils ont maintenant eux-mêmes des enfants. Ce sont des adultes. Même la petite dernière. Leur travail se situe toujours à la marge, dans les décharges, la petite industrie de la récupération. J'espère qu'ils sont le plus heureux possible et qu'ils sont tous en capacité d'aller et de venir, de regarder le ciel bleu et non les quatre murs d'une cellule. Mais à vrai dire, je n'en sais rien.

Ici, je connais d'autres enfants. Leur histoire n'est pas la même, mais leur vie n'est pas un fleuve tranquille. Nous nous rencontrons une fois par semaine, je suis bénévole et je les accompagne pour faire les devoirs. On rit beaucoup. On a inventé le jeu de la maison. C'est une maison dessinée à grands traits de stylo bleu sur une feuille de cahier de brouillon. On part du rez-de-chaussée et à chaque bonne réponse, on monte un étage. A chaque étage se trouvent des merveilles (toujours dessinées au stylo bleu par mes soins, c'est dire si l'imagination joue un grand rôle). Les enfants ont eux-mêmes décidé du contenu des merveilles.

Apprenez donc que le premier étage abrite de l'or, le deuxième, des bonbons, le troisième des fleurs, le quatrième de la nourriture. Le cinquième étage est une salle où tous les jeux du monde sont à disposition.. Mais si on fait l'andouille, on peut descendre au sous-sol où règnent des entités diverses (toujours choisies par les enfants) : au premier sous-sol on croise des fantômes. Un étage plus bas tout le nécessaire pour faire le ménage attend les malheureux qui devront se livrer à cette activité fort désagréable. Au troisième sous-sol, il y a des voitures, objet convoité, mais si on y descend, c'est pour les laver ! Enfin au quatrième sous-sol se cachent des monstres.

Ce jeu a des vertus incroyables, il a permis à R. d'apprendre les terminaisons de l'imparfait et d'écrire les mots de la semaine sans faute. Il a transformé M. qui peut rester mutique et replié sur lui-même, en garçon volubile et jovial. Au moins pour quelques instants magiques.